Une fois, j’ai demandé aux enfants qui allaient faire leur 1ère communion si recevoir Jésus-Hostie allait faire d’eux des Saintes et des Saints, les sanctifier. Ils m’ont regardé bizarre, ne comprenant pas pourquoi je posais cette question : ils me font confiance et ils ont raison. Ils voient bien qu’avec le Diacre et les Catéchistes nous nous conformons à un rituel qui nous dépasse, transmis de génération en génération, et c’est en soi rassurant. Dans l’évangile qu’on vient d’entendre, les disciples ne demandent pas à Jésus comment il veut célébrer la Pâque mais où veut-il qu’eux-mêmes fassent les préparatifs. Et ils sont contents d’apprendre que le cadre est prêt. Jésus a tout prévu. Ils n’ont pas besoin de savoir qui est cet homme portant une cruche d’eau, signe distinctif au milieu des femmes, ni à qui appartient la maison qui les accueille, en tout cas une riche famille pour avoir une maison à étage, assez grande car ils sont nombreux, famille riche et généreuse pour leur mettre à disposition en ces jours où la ville de Jérusalem était archibondée, débordant de juifs pieux et de pèlerins. Dans la pire des cohues, que peut être notre cœur ou notre esprit, Dieu peut trouver un espace de calme pour le recevoir. C’est nous qui en doutons
Le mois dernier, une paroissienne qui allait recevoir le sacrement de confirmation m’a raconté qu’une de ses amies, catholique, s’en était étonnée : cette paroissienne demandait la force des sacrements pour se libérer d’entraves, de forces obscures, qu’elle imputait à sa participation des années plus tôt à des pratiques ésotériques et spirites. Et son amie lui avait plutôt conseillé une voyante de sa connaissance, estimant que ces liens qui la faisaient souffrir ne pouvaient être dénoués que par ceux qui sont capables de les nouer. Il faut être un peu tordu pour penser que les mieux à même de vous délivrer d’un mal sont ceux-là mêmes qui peuvent vous faire du mal. Nous croyons en Dieu parce qu’il ne peut nous faire que du Bien. Sinon il n’est pas Dieu. Voilà l’acte de foi à poser chaque fois que nous prions : Dieu ne fait que du Bien.
Il n’y a aucun danger en Dieu. C’est à cela que nous le reconnaissons : Dieu est Amour. Et c’est à cela que nous devrions reconnaître ses enfants : c’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples dit Jésus (Jn 13, 35). Telle est la nouveauté de son commandement de nous aimer les uns les autres. Ce qui est ancien est le refus d’aimer. C’est si ancien que nous le nommons péché originel, qui est à l’origine de nos malheurs, de nos souffrances et de nos difficultés : le manque de confiance en Dieu.
Maintenant la question que nous devons nous poser est pourquoi nous avons tant de mal à nous améliorer, et pourquoi nous fidèles catholiques ne sommes-nous pas meilleurs ?
Comment se fait-il qu’étant baptisés, catéchisés, ayant la connaissance des commandements, ayant fait notre première communion, notre confirmation, ayant ce lien à la Trinité Sainte, au Père par le Baptême, au Fils par l’Eucharistie, au Saint-Esprit par la Confirmation, et en pratiquant ces sacrements, en allant tous les dimanches à la messe, nous confesser chaque année, et plus le cas échéant, comment se fait-il que nous soyons si loin de la Sainteté ?
Le pire est pour nous prêtres qui célébrons chaque jour la messe, mais laissons les prêtres de côté, la liturgie est bien faite : vous prierez pour nous vendredi prochain en la fête du Cœur sacré de Jésus.
Comment se fait-il que Catholiques fidèles pratiquants soyons si peu catholiques, si peu prompts à nous aimer les uns les autres comme Jésus nous a aimés. Il faut que nous affrontions cette question difficile de l’efficacité des sacrements. Où est-ce que ça bloque ?
La force des sacrements est d’être efficaces en soi, d’agir ex opere operato, par le fait que l’action est accomplie, indépendamment des mérites et de la sainteté de l’exécutant : « le sacrement n’est pas réalisé par la justice de l’homme qui le donne ou le reçoit, mais par la puissance de Dieu », disait saint Thomas d’Aquin. Cependant, « les fruits des sacrements dépendent aussi des dispositions de celui qui les reçoit » (CEC 1128). La Tradition a défini trois critères : la foi, l’état de grâce et l’intention (droite).
1ère raison pour que ça bloque : l’insuffisance de foi par ignorance fautive de notre part. L’ignorance est un fléau et un danger qui expose ses victimes à toutes sortes d’erreurs et de manipulations. Une œuvre de Miséricorde spirituelle consiste à enseigner les ignorants. « Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, enseignez-les, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé ».
La Règle de saint Benoît ordonne (au chapitre 48 sur le travail quotidien : « L’oisiveté est l’ennemie de l’âme ») qu’à chaque Carême, « chacun recevra un livre de la bibliothèque, qu’il devra lire en entier et d’une manière suivie. Ces livres seront distribués au début du Carême. On ne manquera pas de désigner un ou deux anciens, qui parcourront le monastère aux heures où les frères vaquent à la lecture, afin de voir s’il ne se rencontre pas, par hasard, quelque frère nonchalant qui, au lieu de s’appliquer à la lecture, se livrerait à l’oisiveté ou à des bavardages, et qui, non seulement se nuit à lui-même, mais encore entraîne les autres à la dissipation ». Et l’usage voulait qu’en rapportant les livres, les frères partagent le profit qu’ils en avaient tiré, et si quelqu’un était incapable d’en dire quoi que ce soit, il repartait avec, le re-lire, recommencer !
Nourrir sa foi.
2ème raison de blocage, la perte de l’état de grâce, par incohérence de vie. Il ne faut pas cesser pour autant d’aller à la messe mais être conscients que les fruits sont plus petits.
3ème point à vérifier, l’intention du cœur. Quelle est la grâce que vous êtes venu demander au Seigneur en cette messe, dont profitera toute l’Eglise et toute l’humanité ? Vous êtes-vous jamais posé la question ? Quel est mon point de conversion qui contribuera au Salut du monde ?
La foi, l’état de grâce et l’engagement du cœur. Nous recevons le Corps du Christ, l’Homme Parfait, sans aucun péché, pour que ce Corps devienne notre corps, et pouvoir ainsi chacun et ensemble avancer, progresser, et déjà progressivement ressusciter.
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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