33ème dimanche du temps ordinaire - 17 novembre 2024

Mc 13, 24-32

 

La vie est une chance, saisis-la. La vie est beauté, admire-la. La vie est bonheur, savoure-le. A Noël dernier, j’avais repris cette prière de Mère Teresa, en ajoutant que la vie est naissance et la vie est lumière : naissance à la vie de Gloire pour les élus que le Fils de l’homme rassemblera des quatre coins du monde, même si on devrait, plutôt que naissance, dire passage ou transformation, cette nouvelle naissance étant difficile à comprendre, souvenez-vous de Nicodème (cf. Jn 3, 4), naissance à la vie de Gloire par l’entrée ou le retour dans la lumière divine, la lumière de l’origine, du premier acte de la Création quand « Dieu dit : Que la lumière soit. Et la lumière fut. Et Dieu sépara la lumière des ténèbres » (Gn 1, 2-3).

Le dernier jour sera semblable au premier. Il se fera par la séparation définitive de la lumière et des ténèbres, aujourd’hui tellement mélangées.

La prière de Mère Teresa se poursuit ainsi : « la vie est un rêve », à condition de ne pas le laisser à l’état virtuel : « réalise-le ! ». « La vie est un jeu, joue-le. La vie est précieuse, prends-en soin ». La vie est précieuse, elle est fragile, elle est surtout unique : nous n’avons qu’une seule vie. C’est la limite de la comparaison avec le jeu : jouer cela veut dire rejouer, et c’est ce qui fait qu’une défaite n’est pas la mort.

La vie a ceci de radicalement différent avec le rêve ou le jeu qu’on ne vit qu’une seule fois et « on ne meurt qu’une seule fois, avant d’être jugés » (He 9, 27), c’était la 2ème lecture de dimanche dernier. Nous n’avons qu’une seule vie, présente et à venir, nous n’avons qu’une seule terre, et nous formons une seule humanité. Et tout ne se répare pas. Il y a des choses que nous pouvons reconstruire, réparer, d’autres pas.
Il y a surtout des choses qui ne s’effacent pas.
Tant d’imprudents croient que ce qu’ils consultent ou envoient sur internet disparaît ou s’effacera, alors que c’est plus compliqué, et encore, c’est de la matière inerte. Tandis que de l’esprit humain, rien ne sera effacé. Ce qui est enfoui resurgira. Tout devra être assumé, tout pourra être pardonné, rien ne sera annulé.
Elles sont si nombreuses les personnes qui s’imaginent de ce qu’elles vivent qu’on n’en saura rien, que personne ne les voit, qu’elles n’auront pas de comptes à rendre. Relisez Victor Hugo : “L’œil était dans la tombe, et regardait Caïn”.

Depuis six mois, une société d’excursion touristique, Citywonders, chassée du Trocadéro par les JO a fixé notre église Notre-Dame de Compassion comme lieu de rendez-vous à ses clients. ‘Meeting-point : Notre-Dame de Compassion’. Transformant la chapelle en abribus. J’ai tout essayé, sans résultat avec ce type de société internationale (basée en Irlande) et, en désespoir d’exaspération, j’avais songé, si cela n’avait pas été illégal, demander à un hacker de changer sur leur site ce point de rendez-vous en mettant : ‘Meeting-point : Au Purgatoire ’.

Meeting-point : Au Purgatoire.

Cela pourrait être le titre de ces pages terribles de l’évangile qu’on nomme le discours apocalyptique de Jésus.
Nous les ré-entendrons dans deux dimanches, au 1er dimanche de l’Avent, dans l’évangile de saint Luc : « Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées » (Lc 21, 25-26).
Nous irons tous au Purgatoire.

Ce dimanche journée mondiale des pauvres devrait retentir comme un avertissement pour nos pays riches, nos villes d’abondances et d’extrêmes inégalités, et jusque pour notre église de Paris loin de partager ses richesses avec les diocèses de France qui souffrent misère.

Les prophètes de l’Ancien Testament, que nous entendons tout au long de l’année en 1ère lecture quand ce n’est pas un texte de Sagesse mais les deux se rejoignent, avaient pour mission de rappeler au peuple de Dieu et à ses chefs leurs obligations à l’égard du Seigneur, les engagements de l’Alliance, en un mot notre contrat de vie.
Cette formule dit nos engagements les uns à l’égard des autres devant Dieu. C’est ce que nous rappelle notre conscience pour peu qu’on soit prêt à l’écouter.

Le rôle d’un contrat est de garder trace et mémoire.

Comme dans la prière, ainsi que saint Augustin l’expliquait du Notre Père (dans la ‘Lettre à Proba’) :
« Quand nous disons : Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés, nous rappelons à nous-mêmes et ce que nous demandons et ce que nous devons faire pour être exaucés.
Quand nous disons : Ne nous laisse pas entrer en tentation, nous rappelons à nous-mêmes ce qu’il faut demander : que nous ne consentions pas à une tentation trompeuse, ou que nous ne fléchissions pas sous une tentation accablante parce que nous serions privés du secours divin.
Quand nous disons : Délivre-nous du Mal, nous rappelons à nous-mêmes qu’il ne faut pas nous croire établis dans un lieu où nous n’aurions plus à souffrir aucun mal ».

Nous avons besoin de nous le rappeler, de faire remonter à notre conscience ce qui est enfoui en nous, avant que cela se fasse malgré nous, lorsque « tout ce qui est caché sera connu, tout ce que nous aurons dit (ou fait) dans les ténèbres sera entendu (et vu) en pleine lumière » (cf. Lc 12, 2-3).

On n’a qu’une seule vie. Rien ne restera enfoui.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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