Quand j’étais enfant, dans les années soixante, à l’école j’avais dans ma classe un ou deux camarades sur trente dont les parents étaient divorcés. C’était la proportion du taux de divorces : 30.000 par an pour 320.000 mariages. Le groupe était homogène. Le regard posé sur les divorcés n’était pas beau : il manquait d’amour car il ne voyait que la loi. Toute la question est de savoir si on diminue la loi est-ce qu’on augmente l’amour ? Pas sûr.
La messe le dimanche était suivie du déjeuner en famille. Et à l’église aussi l’assemblée était homogène, composée de pratiquants, des gens du quartier qui se connaissaient.
Aujourd’hui à la messe le dimanche, l’assemblée est composite, entre les fidèles qui méritent le nom et ne souffrent aucun écart, les libéraux qui s’accommodent d’absences fréquentes, que les sociologues considèrent comme messalisants quand ils viennent une fois ou deux par mois, les intermittents qui viennent par périodes, les économes qui se limitent aux grandes fêtes : Noël, les Rameaux, le 15 Août, la Toussaint. Et puis il y a ceux qui viennent une fois par an en famille à Noël … comment les appeler ? à venir plus souvent !
L’Esprit-Saint fait l’unité dans la diversité. Dieu attend de nous que nous lui soyons fidèles : « Si vous m’aimez, dit Jésus, vous garderez mes commandements ». Dieu est fidèle, et même quand nous sommes infidèles, Dieu reste fidèle car il ne peut se renier lui-même (2 Tim 2, 13). C’est le fondement de l’Alliance, et de tous les sacrements.
Est-ce que, si la Messe était tous les mois, les baptisés seraient plus nombreux ? Est-ce que les Catholiques viendraient plus souvent si c’était moins fréquent ?
Aux fiancés qui se préparent au mariage, nous proposons une réunion mensuelle d’une heure, et ils y sont assidus. C’est pour une année et ils ont besoin de nous pour le dossier. Mais je me suis demandé si les Catholiques seraient plus fidèles à la Messe si c’était une fois par mois. Pour la préparation du Synode, des réunions se sont tenues dans les paroisses où on a encore passé un temps improbable à se demander si les prêtres devaient se marier, s’ils ne seraient pas plus nombreux et plus disponibles en étant mariés.
Autant se demander si en abaissant le niveau d’exigence, on facilite l’entrée ?
Il suffit de lire l’évangile pour voir que ce n’est pas le choix de Dieu. Cela n’empêche pas la patience, l’indulgence, le pardon. Mais cela exige des efforts, des sacrifices, de l’amour. Bien davantage que le strict respect de la loi ou le sens du devoir.
Jusqu’à l’Ascension du Seigneur, la fête de la Pentecôte commémorait le don de la Loi. Moïse avait entraperçu la Gloire de Dieu et quand il était redescendu, son visage rayonnait. Depuis l’Ascension du Seigneur, la Pentecôte célèbre le don de l’Esprit et la naissance de l’Eglise. Même si déjà le jour de Pâques le Christ avait soufflé sur ses Apôtres et dit : recevez l’Esprit-Saint. Même si l’Eglise était déjà née du côté transpercé de Jésus sur la Croix : il en était sorti du sang et de l’eau, les sacrements qui donnent la vie.
Oh bien sûr nous savons qu’il n’y a pas que de l’Esprit-Saint dans l’Eglise, il n’y a pas que de la sainteté, un peu comme Paul Valéry pouvait écrire en 1919 : « Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles ». Etait-ce vraiment une découverte ?
Qu’il n’y ait pas que de l’Esprit-Saint dans l’Eglise, nous en avions lundi un bon rappel avec la fête de sainte Jeanne d’Arc trahie par l’évêque Pierre Cauchon.
Il n’y a pas que de l’Esprit-Saint dans l’Eglise, mais l’Esprit-Saint est l’âme de l’Eglise et les sacrements donnent la grâce aux baptisés de lui être fidèles, comme sainte Jeanne d’Arc en a été un modèle : « Etes-vous en état de Grâce ? » – « Si je n’y suis pas, que Dieu m’y mette ».
Et interrogée sur les ennemis, les envahisseurs : « Dieu a-t-il de la haine pour eux ? » – elle répondit : « De l’amour ou de la haine que Dieu a pour nos ennemis, je n’en sais rien ; mais je sais bien qu’ils seront tous boutés hors de France, excepté ceux qui y périront ».
L’Esprit-Saint est l’âme de l’Eglise et l’Eglise est Une, sainte, catholique et apostolique quand elle se laisse conduire par l’Esprit-Saint. Nous l’entendions il y a deux dimanches des Apôtres au 1er Concile de Jérusalem : « L’Esprit-Saint et nous-mêmes avons décidé » (Ac 15, 28). Décidé quoi ? De ne pas faire peser trop d’obligations sur ceux qui se tournent vers Dieu et nous rejoignent. Est-ce qu’une heure de messe le dimanche est une charge excessive ? Je pense aux parents excédés par leurs adolescents : ‘Moins on t’en demande, moins tu en fais !’
La Pentecôte est précédée d’une messe la veille au soir, une Vigile, pour être vigilants. Lisez ces textes de la Vigile de Pentecôte : ce sont des fondamentaux comme ceux de la nuit de Pâques (vous les trouverez sur AELF le site de l’Association Episcopale Liturgique Francophone www.aelf.org), notamment le récit de la vision vécue par le prophète Ezéchiel dans la vallée de la mort, au sol couvert d’ossements desséchés (Ez 37).
Le Seigneur l’interroge : « Fils d’homme, ces ossements peuvent-ils revivre ? ». « Seigneur, c’est toi qui le sais ! ». Le Seigneur lui dit : « Prophétise sur ces ossements ». Il y eut un bruit, une violente secousse comme à la Pentecôte, les ossements se rapprochèrent les uns des autres, se couvrirent de nerfs, la chair, la peau les recouvrait, mais il n’y avait pas encore d’esprit en eux.
Le Seigneur dit : Invoque l’Esprit-Saint ! « Dis à l’Esprit : Viens esprit des quatre vents, viens ! Souffle sur ces morts et qu’ils vivent ». L’Esprit entra en eux, ils revinrent à la vie et se dressèrent sur leurs pieds. Debout, ressuscités ! C’était une armée immense ! Vivants, disciplinés, dociles, motivés, combatifs, affutés !
De quoi ou en quoi l’Esprit-Saint est-il le Défenseur ? De nos intérêts ? De notre tranquillité ? Ou de notre fidélité, du combat que nous avons à mener, le bon combat de la foi (1 Tim 6, 12).
Au Vainqueur dit le Seigneur je donnerai un caillou blanc, et inscrit sur ce caillou, un nom nouveau que nul ne sait, sauf celui qui le reçoit.
Au Vainqueur, je lui donnerai de siéger avec moi sur mon Trône, comme moi-même, après ma victoire, je siège avec mon Père sur son Trône de Gloire (Ap 2, 17. 3, 21).
Viens Esprit-Saint, viens Esprit des quatre vents !
Sois notre Défenseur, le Défenseur de la Victoire !
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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