L’Immaculée Conception est la première des trois consécrations de la Vierge Marie : sa mise à part, par Dieu, dès sa conception dans le ventre de sa mère, pour être la Mère de son Fils. Sa 2ème consécration, nous l’avons fêtée le 21 novembre, sa Présentation au Temple, quand elle a été mise à part par ses parents, la Tradition dit quand elle a eu trois ans, qu’elle a été en âge de marcher, en réalité quand elle a été en âge de dire non, vers deux-trois ans, l’âge du non (et qui était chez Marie un non à ce qui est mal, on ne peut pas utiliser pour elle l’expression des anglo-saxons qui appellent cet âge le terrible-two). Et la 3ème consécration de Marie est celle qu’elle prononce à l’Annonciation, que relate l’évangile que nous venons d’entendre, le don total d’elle-même que nous fêtons le 25 mars, sa propre consécration.
3 consécrations : par Dieu, par ses parents, par elle-même. La première, qui lui est unique, sans équivalent au monde, ne lui enlève pas son caractère humain, au contraire, puisqu’ellerévèle la vraie nature du psychisme humain, de l’humanité préservée ou définitivement purifiée du péché.
L’effet principal de sa consécration divine, dès sa conception, porte sur son lien au péché et par voie de conséquence sur sa conscience : le propre de la Vierge Marie est d’avoir une conscience pure, une pure conscience, immaculée, sans aucun regret, frustration, pure de tout refoulé.
Nous avons une vision tronquée du psychisme humain, déformée par l’interprétation freudienne et psychanalytique, qui entend ou prétend s’exonérer de toute considération morale et qui considère l’inconscient comme constitutif du psychisme humain alors qu’il est peut-être en large part la conséquence du péché.
C’était tout à fait significatif dans la 1ère topique freudienne où l’inconscient était constitué de tout le refoulé, avant que la 2ème topique ne crée ces concepts si particuliers du ça, du moi et du surmoi, qui ne permettent plus de dialogue ou de confrontation.
Il n’y a pas, il n’y avait pas chez Marie d’inconscient au sens de la 1ère topique, de pulsions, de désirs et de pensées refoulées, ni assumées ni maîtrisées, Marie ne refoulait rien : tout ce qu’elle conçoit, toutes ses conceptions comme ses désirs sont purs, sans arrière-pensées, gratuites,
Qu’est-ce qui est ‘pur’ chez Marie, la toute-pure ? La réponse est sa conscience.
L’autre jour, une fidèle très âgée est venue me voir très troublée car en regardant sa vie elle se demandait si ce qu’elle avait fait de bien ne l’avait pas été par orgueil, pour se faire bien voir. Madame, c’est une tentation ! Une attaque du Tentateur ! Rejetez ces pensées, ce sont des tentations : évidemment que toutes nos actions, nos intentions sont un peu mélangées – il n’y a que la Vierge Marie, la toute-pure, qui en soit préservée !
Pourquoi est-ce important à comprendre ? Cela nous montre ce qu’est la nature humaine quand elle est parfaitement unie à Dieu. Elle n’est également en cela qu’un petit aperçu de l’humanité de Jésus qui, lui, est Dieu, tandis que Marie est une créature.
Ce qui importe chez Marie n’est pas la rapidité de son intelligence, de déduction, de calcul, de conceptualisation, d’analyse ou de synthèse, ce n’est pas le nombre d’opérations mentales dont elle est capable, mais leur exactitude. Elle ne se trompait pas.
Et c’est un aperçu de ce que nous vivrons dans la vie éternelle, de notre corps ressuscité, dont la spiritualisation sera telle qu’il ne souffrira plus de pulsions désordonnées.
Qu’est-ce que le corps spiritualisé, tel que l’enseigne la Tradition, dans sa longue réflexionsur les dons préternaturels de l’homme voulu par Dieu, à notre Création ? Un corps dont les pulsions sont totalement soumises à sa volonté, elle-même parfaitement éclairée par son intelligence, parfaitement soutenue par la limpidité de sa mémoire. Il suffit que l’un de ces éléments se dérègle ou n’ait pas été correctement structuré pour que l’ensemble soit défaillant.
Les deux autres consécrations de la Vierge Marie ont trait pour l’une, par ses parents, à sa culture, on pourrait dire son référentiel, de tradition et d’environnement, quand elle va grandir au Temple. Et sa propre consécration est celle de sa volonté, son engagement dans sa vocation. Ces trois consécrations sont évidemment liées : sa conscience, sa culture, son état de vie.
Lorsque saint Paul dit que sa conscience ne lui reproche rien (1 Co 4, 4), il exprime uneexpérience différente de celle de Marie, mais commune à tous les hommes et femmes qui ont connu le Christ, d’avoir été pardonné, purifié de ses péchés par le Christ juge des vivants et des morts : « Ma conscience ne me reproche rien » dit-il ajoutant aussitôt : « mais ce n’est pas pour cela que je suis juste : celui qui me soumet au jugement, c’est le Seigneur ». Ce n’est pas la même chose d’avoir une conscience pure et une conscience purifiée.
Ces trois consécrations de Marie n’ont de sens que dans leur lien au Christ. La prière de cette fête dit que son Immaculée Conception est « une grâce venant déjà de la mort de son Fils ». Certains sont tentés ces temps-ci de faire croire qu’on pourrait aimer la Vierge Marie détachéeséparée voire amputée de son Fils. Marie est la seule créature parfaitement unie à son Créateur, qu’elle a eu la grâce inouïe d’engendrer, et de ce fait elle ne porte pas non plus cette part d’inconscient collectif qui vient de notre participation aux désordres du monde (pour anticiper la critique que pourraient me faire des jungiens), étant préservée de ce que Jean-Paul II appelait les structures de péché.
La conscience de Marie est pure, parce qu’elle resplendit toute entière, depuis sa Conception, de la Lumière du Seigneur. Voilà ce que sera notre entrée dans la vie divine : la purification pas seulement de nos péchés mais également de tout ce que nous aurons refoulé.
Qu’est-ce que la Vierge Marie sans le Christ ? Une idole. Qu’est-ce Marie sans le Christ ?Qu’est-ce que le Christ sans le Salut ? S’il n’est pas Ressuscité, alors vaine est notre foi ! (cf. 1 Co 15, 14).
Priez pour nous, Vierge Marie, en votre Immaculée Conception, Vierge Pure de toute pulsion ou idée désordonnée, pure de tout refoulé, – la seule créature qui soit pure et non pas purifiée.
Marie la Toute–Pure pour être la Mère du Sauveur, béni sois-tu Seigneur !
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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