Fête de la Présentation du Seigneur - dimanche 2 février 2025

Lc 2, 22-40

 

Dans cette scène de la Présentation au Temple, qui faut-il regarder ?

L’Enfant-Jésus, c’est-à-dire le Christ ?
Ses parents qui l’amènent au Temple, Marie et Joseph ?
Ou les deux Anciens qui les attendaient, le vieillard Syméon et la prophétesse Anne, elle aussi « très avancée en âge » ?

Admirons déjà la réunion des trois générations, enfant, parents, anciens : pour qu’une fête des hommes soit une fête de Dieu, il convient que toutes les générations soient représentées, tous les âges, signe que cette fête traverse le temps. « Jeunes et vieux se réjouiront tous ensemble, oracle du Seigneur, je changerai leur deuil en joie, je les consolerai de leurs peines » (cf. Jr 31, 13).

Mais, à qui donner la primauté ?

La réponse est clairement donnée par l’œuvre du Bienheureux Fra Angelico, cette fresque réalisée au milieu du 15ème siècle au couvent San Marco de Florence :

Les cinq personnages sont tournés vers l’Enfant-Jésus que Syméon, pas tout à fait au centre, au centre à égalité avec Marie à sa droite, tient au creux de son bras gauche, sa main droite posée sur l’enfant.
Marie a les mains tendues dans un geste de bénédiction plus que d’offrande, comme si elle imposait les mains. Derrière elle, Joseph, lui aussi de profil, porte le panier de l’offrande.
Devant Joseph, en contrebas, un Dominicain est à genoux, en prière. A l’opposé, sur le bord droit, debout, une femme, la prophétesse Anne, en robe noire de veuve, regarde sans rien dire.

L’Enfant-Jésus, les yeux grand ouverts, regarde sa mère, à qui Syméon va annoncer que son « âme sera traversée d’un glaive ». On peut penser, surtout ici à Notre-Dame de Compassion, à toutes les mères qui ont perdu un enfant.
On peut penser aussi, devant cet Enfant qui est le Verbe Incarné, à l’ordre donné dans le Livre de l’Apocalypse de prendre le petit livre de la main de l’ange : « Dans ma bouche il était doux comme le miel, mais, quand je l’eus mangé, il remplit mes entrailles d’amertume » (Ap 10, 10).

« Nous comprenons, disait le Pape Benoît XVI dans son homélie du 2 février 2010, qu’à ce moment-là, c’est Dieu lui-même qui présente son Fils Unique aux hommes ». Aux hommes, pas au Temple : Jésus n’avait pas plus besoin d’être présenté au Temple qu’il n’avait besoin d’être baptisé par Jean-Baptiste.
S’applique à cette Présentation du Seigneur au Temple ce que saint Maxime de Turin disait du baptême de Jésus par Jean : que le Christ a voulu être « baptisé non pas pour être sanctifié par l’eau, mais pour sanctifier lui-même l’eau et pour purifier par sa pureté ces flots qu’il touche » : il venait purifier la Création.
Semblablement ici, le Christ vient purifier le Temple. Comme il le fera de façon spectaculaire avec l’expulsion des vendeurs qui suit le récit des Noces de Cana que nous entendions il y a deux dimanches dans l’évangile de saint Jean.

Purifier la Création, purifier le Temple, purifier notre cœur. Ces purifications ne portent pas tant sur les relations d’intérêt que nous pouvons avoir avec Dieu, je te donne si tu me donnes ça, – l’évangile ne cesse de nous appeler à la gratuité de l’amour-, que sur le danger qui nous menace tous de nous croire ‘installés’ au mauvais sens du terme : d’arrêter d’avancer.

Comme Syméon, allons, poussés par l’Esprit, au-devant de Celui qui vient !

En Orient, cette fête est appelée Hypapante, la fête de la rencontre (d’un mot grec qui veut dire ‘aller au-devant’).

Marie et Joseph remettent Jésus entre les mains de Syméon qui le reçoit dans ses bras comme il en avait reçu l’annonce par l’Esprit-Saint. Ils acceptent que leur enfant ne leur appartienne pas. Quel arrachement pour des parents quand leur enfant se consacre à la prêtrise ou à la vie religieuse !

En voyant Syméon et Anne, comment ne pas se souvenir de Zacharie et Elisabeth au début de l’évangile de saint Luc, dont les prières avaient également été exaucées au-delà de leurs attentes : Dieu exauce nos prières, rarement de la façon que nous imaginions.
Syméon et Anne attendaient l’un « la consolation d’Israël », l’autre « la délivrance de Jérusalem » : ils voient la Gloire de Dieu, anticipant la parole des disciples du jour de Pâques : « Reste avec nous car le soir approche et déjà le jour baisse » (Lc 24, 29). Tant d’Anciens peuvent faire cette prière : Reste avec nous car notre Pâque approche et nos forces diminuent. Pourtant ce n’est pas la mort qui vient, c’est la lumière de la vie !

Mes amis, il faudra pour certains d’entre nous l’avoir longtemps, longtemps attendue, s’y être préparés, en restant fidèles à la foi de nos pères.

Dans l’Ancien Testament, Syméon est le nom d’un des douze fils de Jacob, celui que Joseph garde avec lui pour faire revenir ses frères, tandis que Anne est la mère du prophète Samuel celui-là même qui consacrera David. Anne comme Elisabeth était en attente d’enfant et elle a été exaucée : son cantique d’action de grâce a inspiré le Magnificat de la Vierge Marie.

« La jeune fille se réjouit, elle danse ; jeunes gens, vieilles gens, tous ensemble ! » (Jr 31, 13).

Toutes les générations s’harmonisent en ce jour de fête dans la lumière, la mémoire et l’espérance.

La lumière, la mémoire et l’espérance.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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