Il y a, deux chapitres plus loin dans l’évangile de saint Jean, une autre apparition forte de Jean-Baptiste, une scène étonnante, après les noces de Cana, l’expulsion des vendeurs du Temple à Jérusalem, la rencontre avec Nicodème : l’évangéliste dit que « Jésus se rendit alors en Judée avec ses disciples, et là il baptisait » (Jn 3, 22).
Jésus baptisait ?!
Dans l’Esprit-Saint ? comme nous l’avons entendu dimanche dernier de la bouche de Jean-Baptiste ? « Moi, je vous ai baptisés avec de l’eau ; lui vous baptisera dans l’Esprit Saint » (Mc 1, 8) ? Non, le baptême dans l’Esprit-Saint, c’est la Résurrection ! Le baptême dans l’Esprit donne la foi en la Résurrection. Que demandez-vous pour votre enfant ? Le baptême. Que donne le baptême ? La foi. Que donne la foi ? La vie éternelle.
Voici le texte : « Il y eut une discussion entre les disciples de Jean et un Juif au sujet des bains de purification. Ils allèrent trouver Jean et lui dirent : ‘Rabbi, celui qui était avec toi de l’autre côté du Jourdain, celui à qui tu as rendu témoignage, le voilà qui baptise, et tous vont à lui !’ » (Jn 3, 25-26).
Jésus baptisait ?! Avec de l’eau, des bains de purification comme Jean-Baptiste ?
Au risque de vous décevoir, ce n’est pas le sujet de ce dimanche. Le sujet c’est la joie, et d’abord la joie de Jean qui faisait la force et la crédibilité de son témoignage. Telle fut en effet sa réponse sur les baptêmes que faisait Jésus :
« Moi, je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui. Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux ; quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux, et il en est tout joyeux. Telle est ma joie : elle est parfaite » (Jn 3, 25-29).
Telle est ma joie : elle est parfaite. Elle ne laisse aucune place à la complainte. C’est la joie du Salut.
J’ai vu un documentaire sur la gestion de la 1ère vague de la pandémie dans le plus grand hôpital parisien. C’était admirable de dévouement, d’organisation, d’efficacité, mais le plus fascinant était la plainte, le volume de plaintes des personnels sur leurs conditions de travail, leurs salaires, le manque de reconnaissance sociale, l’inadéquation du système … Parfois l’un ou l’autre ajoutait heureusement qu’on aime notre travail … C’était fascinant : on se serait cru dans l’Eglise, dans la Police ou l’Education nationale, toutes ces institutions qui ont perdu leur âme depuis que les hommes ne s’occupent plus de la leur.
Le mot d’ordre pour ce temps de l’Avent, c’est ranimons, réveillons notre âme ! Et le mot d’ordre pour ce dimanche de la joie, la joie de croire et d’espérer, le mot d’ordre c’est : arrêtons de nous plaindre et je vais vous dire comment.
En apprenant les uns des autres qui est Dieu.
De même que le commandement de l’amour est : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés, dit Jésus, le commandement de la joie est : apprenez les uns des autres comme je vous ai appris qui je suis, dit Jésus.
Apprendre les uns des autres, pas seulement des livres ni des savants, mais des pauvres et des étrangers, des anciens et des dérangés, de tous ceux que nous sommes amenés à rencontrer, à côtoyer, à supporter, en les écoutant, les regardant, patiemment, attentivement amoureusement, pour apprendre les uns pour les autres qui est Dieu.
Un dicton des premiers moines chrétiens disait « Bienheureux le moine qui, après Dieu, considère tous les hommes comme Dieu ». J’ai lu cette phrase dans l’audience du Pape François du 21 octobre dernier, phrase de saint Evagre le Pontique, ou le Turc, la région du Pont correspondant à l’actuelle Turquie.
Saint Evagre vécut au 4ème siècle. Il fut le disciple de saint Basile de Césarée (l’auteur d’un magnifique Traité du Saint-Esprit), puis de saint Grégoire de Nazianze qui l’ordonna Diacre, et l’emmena à Constantinople. En 382 il partit pour Jérusalem avant de se retirer dans le désert, en Egypte où il fut le disciple de saint Macaire de Scété.
La plupart de ces noms ne vous disent rien ? Aucune importance. Je ne connaissais pas saint Evagre et j’ai fait ce que nous faisons tous : j’ai cherché sur internet. Quelles merveilles ! Quelles possibilités prodigieuses nous sont données d’accès aux savoirs les plus divers, aux trésors jadis cachés, comme dit saint Paul à propos du Christ : « Révélation d’un mystère enveloppé de silence aux siècles éternels, mais aujourd’hui manifesté, et par des Ecritures qui le prédisent selon l’ordre du Dieu éternel porté à la connaissance de toutes les nations pour les amener à l’obéissance de la foi ! Amen ! » (Rm 16, 26).
Il n’y a pas de plus grand plaisir que d’apprendre, pas au plan intellectuel, ce serait comme de réduire l’amour au plan charnel. Le plaisir d’apprendre de la diversité des personnes et des situations, de l’infini des réactions et des possibles, sans jamais être perdus puisque Dieu est présent.
Bienheureuse toute personne qui place Dieu en premier, et qui, après Dieu, considère tous les autres comme Dieu, autant de signes de son amour, de témoins de sa bonté et de notre liberté. Voilà ce que veut dire baptiser dans l’Esprit : avancer dans la vie avec confiance.
Il n’y a pas de plus grand plaisir que d’apprendre, et de plus grand bonheur que de connaître Dieu.
Joie pour les cœurs qui cherchent Dieu !
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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