Quelles sont les conditions requises pour faire sa 1ère communion ? Et pas seulement la 1ère mais toutes les autres : quelles sont les conditions requises pour communier à la messe ?
Il y en a trois. La première, essentielle, est de croire de toutes ses forces que l’hostie est Dieu, le corps de Dieu puisque c’est le Corps du Christ. La formulation fait bizarre car, bien sûr, à strictement parler, Dieu n’a pas de corps : Dieu est Esprit. Mais Dieu s’est fait homme en Jésus Christ et Dieu s’est fait nourriture, comme on vient de l’entendre dans l’évangile, pour que nous ayons la Vie en nous.
Dimanche dernier, au moins deux personnes m’ont demandé après la messe pourquoi nous avions chanté : « Marie mère de Dieu » ? Marie est la mère de Dieu parce qu’elle est la mère du Christ même si, évidemment, Dieu n’a pas de mère. Semblablement, nous communions au Corps du Christ qui est Dieu, même si Dieu est Esprit et n’a pas de corps.
Pour croire que l’hostie est Dieu, il faut être baptisé, avoir reçu l’Esprit saint, car nul ne peut dire que Jésus est Seigneur, nul ne peut dire ‘Amen je crois’ au ‘Corps du Christ’, si ce n’est sous l’action de l’Esprit-Saint.
La deuxième condition pour communier est de discerner (faire la différence entre) le bien et le mal. Pour les enfants, cela signifie avoir l’âge de raison, c’est-à-dire de discernement. Pour les plus grands, cela signifie refuser le mensonge qui consiste toujours à faire passer un mal pour un bien. Le mensonge est de l’ordre de la pensée avant d’être de l’ordre de la parole ; il n’est d’ailleurs pas forcément une parole.
Voilà pourquoi au début de la messe, nous confessons que nous avons péché en pensée, avant que ce soit en paroles, en action ou par omission. Ce n’est pas pour le plaisir de battre sa coulpe, mais pour nous conformer à ce que demande saint Paul : « que chacun s’examine soi-même avant de manger de ce pain et de boire à cette coupe » (1 Co 11, 28), ajoutant pour ceux qui n’auraient pas compris : « Il mange et boit son propre jugement celui qui ne discerne pas le corps du Seigneur ».
La troisième condition est d’aller à la messe tous les dimanches pour écouter ensemble les textes fondateurs de notre foi. Nous en avons un exemple spectaculaire avec la 1ère lecture de cette fête, qui raconte l’histoire de la manne au désert, pourquoi et comment c’est arrivé, et pourquoi l’hostie n’est pas comme la manne « que les pères ont mangée. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain que je lui donnerai dit Jésus vivra éternellement ». Lors d’un récent goûter du catéchisme, le papa d’un enfant me demandait pourquoi il était ‘interdit’ de manger dans l’église : j’aime bien, me disait-il, savoir le sens de ce que je fais. Ah ! si tous les Chrétiens pouvaient en dire autant ! Comprendre ce que nous faisons : magnifique !
Comprendre qu’à l’église, il y a une seule nourriture, le Pain de Vie, comme il y a une seule Parole, celle de Dieu, à partir de laquelle sont écrits les textes de la messe, et que seul le prêtre et le diacre sont habilités à commenter.
Je vous assure que l’écoute à la messe des textes du dimanche, en emportant le cas échéant la feuille de messe pour les relire chez soi tranquillement, est le meilleur catéchisme qui soit, pour petits et grands.
Maintenant je voudrais m’arrêter sur cette phrase de l’évangile, quand les auditeurs de Jésus se disputent : « les Juifs se querellaient entre eux : Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? ». Elle exprime parfaitement le caractère extraordinaire de cette nourriture.
Déjà la manne au désert avait été un événement sans précédent. A tel point que, dans l’Arche d’Alliance, ce coffre mythique que le peuple hébreu transportait, signe de la présence de Dieu, il y avait, en plus des Tables de la Loi, un morceau de cette Manne, de façon d’autant plus mystérieuse que sa particularité était qu’elle ne se conservait pas : on ne pouvait ramasser que ce que l’on pouvait manger chaque jour. C’est encore aujourd’hui un motif de division entre chrétiens, entre Catholiques et Protestants : ceux-ci ne croient pas à la Présence réelle, ils ne croient pas qu’on puisse la conserver.
Dans l’Arche d’Alliance, il y avait les Tables de la Loi, de la Manne, et un troisième objet : le bâton d’Aaron. Un des derniers livres du Nouveau Testament, la Lettre aux Hébreux dit que dans le Saint des Saints se trouvait « l’arche d’Alliance entièrement recouverte d’or, dans laquelle se trouvaient un vase d’or contenant la manne, le bâton d’Aaron qui avait fleuri, et les tables de l’Alliance ; au-dessus de l’arche, les anges de gloire couvraient de leur ombre la plaque d’or appelée propitiatoire. Mais il n’y a pas lieu maintenant d’entrer dans les détails » (He 9, 4-5).
Ce bâton d’Aaron, que Moïse a utilisé lorsqu’il fit des prodiges face à Pharaon, symbolise la légitimité du sacerdoce, de la tribu des lévites consacrée au service de Dieu. Un équivalent pour nous chrétiens serait l’étole du prêtre. J’aime me souvenir, en tant que prêtre, que le Seigneur a changé mon bâton en tissu : je peux taper avec, ça ne fait pas mal. Il a changé le bâton du prêtre en étole de tissu, comme il a changé la croix du supplice en arbre de vie.
Ces trois objets, les tables de la Loi, la Manne du désert, et le bâton d’Aaron, sont les trois symboles historiques de l’Alliance. La Loi est le ciment de la communauté ; la Manne est le pain de chaque jour ; le Bâton la puissance de Dieu qui libère de l’esclavage, fait traverser à pieds secs les eaux de la mort, et fait couler du rocher l’eau de la vie.
Jésus n’a pas aboli (annulé ou abrogé) cette Alliance : il l’a accomplie, il l’a portée à sa plénitude, lui donnant son sens plénier, son efficacité totale. Aussi bien pour la Loi, pour la Manne, que pour la façon dont la puissance de Dieu se manifeste et s’est manifestée sur la Croix, une fois pour toutes, comme une puissance d’amour.
De ces trois objets, la Bible, l’Hostie et la Croix, nous sommes tentés de ne prendre qu’une partie. Il y a en qui prennent la Parole de Dieu mais qui laissent Dieu au loin : ils pensent que la Bible est un beau livre. Il y en a qui prennent l’hostie en se disant que si ça ne leur fait pas de bien ça ne leur fera pas de mal. Il y en a qui prennent la Croix pour un poids supplémentaire de souffrance, voire même une acceptation de l’injustice.
Or, les trois sont inséparables, en tant qu’ils sont signes d’espérance et force de vie. Mieux, chacun des trois éclaire les deux autres : la Bible est la lecture de tout croyant chez soi, qui dit l’Amour de Dieu. L’Hostie est consacrée à l’église, et consacre l’Eglise. La Croix, dressée sur le monde, a été tracée sur nous au jour de notre baptême : elle signe l’Alliance définitive de l’amour et du sacré.
Amen, oui Seigneur, je crois que l’amour vient de toi, et que l’amour est sacré.
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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