5ème dimanche du temps ordinaire - 4 février 2024

Mc 1, 29-39

 

Nous avions mardi dans l’évangile de la messe du jour – puis-je vous rappeler le bienfait d’une lecture quotidienne de l’évangile, notre pain quotidien, c’est un des grands bénéfices d’internet que l’accès direct aux textes, il y avait donc le récit d’une jeune fille que Jésus ramène à la vie : il ordonna « qu’on lui donne à manger » (Mc 5, 43). La semaine précédente, nous avions la conversion de saint Paul : après trois jours, privé de la vue il était resté sans manger ni boire, Ananie vient lui imposer les mains. Paul retrouve la vue, se lève, reçoit le baptême. « Alors il prit de la nourriture et les forces lui revinrent » (Ac 9, 19).
Voyez comme c’est différent ici : la belle-mère de Simon était malade ; Jésus la prend par la main et la relève. « La fièvre la quitta, et elle les servait ». Le mot latin ministrabat a donné en français ministre, ministère.
C’est bien le signe de sa guérison : si manger est un signe de santé, servir les autres est un signe de super-santé !

C’est aussi le signe de son sens du devoir. Nous sommes « dans la maison de Simon et d’André », les deux frères que Jésus avait appelés à sa suite ; à la différence de Jacques et Jean, ils ne travaillaient pas avec leur père : ils avaient leur barque et leur maison à eux, où vivait la belle-mère de Simon. Il n’est pas fait mention d’autres femmes qui auraient déjà été au service. Elle s’y met donc, car c’est la règle, la loi de l’hospitalité qui veut qu’on s’occupe des visiteurs, qu’on les nourrisse, qu’on accueille comme sa propre famille toute personne qui nous rend visite avec de bonnes intentions, qui respecte elle-même les usages et les lois, ce qui était le cas puisque le petit groupe sortait de la synagogue.

On ne demande pas à la belle-mère de Simon si elle est en état de servir après cette forte fièvre, et elle ne se pose pas la question : c’est son devoir et sa mission, la loi de l’hospitalité. Vous connaissez l’adage dura lex sed lex’, la loi est dure mais c’est la loi, la même pour tous.

La dureté de la Loi vient de ce qu’elle ne tient pas compte des goûts personnels, elle s’impose à tous : son rôle est de permettre de vivre ensemble dans la concorde et la paix, ici et maintenant. J’ai un ami athée (qui ne croit pas à la loi éternelle) à qui j’ai demandé (me surprenant moi-même : pourquoi tu lui dis ça ?) s’il était favorable à la discrimination positive. Il m’a répondu oui, de façon temporaire. Pour les athées tout est temporaire.

La dureté de la Loi est un fil conducteur de l’évangile qui fait ressortir la douceur de Jésus qui n’est pas venu abolir la Loi mais l’accomplir : la douceur de Jésus ne contredit pas la dureté de la Loi. Il la transcende.

Nous le verrons dimanche prochain 11 février, j’évoquerai la maladie de son ami Lazare que Jésus n’empêche pas de mourir mais ramène à la vie : comme dit une préface de la Messe des Défunts, « si la loi de la mort nous afflige, la promesse de l’immortalité nous apporte la consolation ».

J’ai rencontré il y a quelques semaines un petit groupe d’étudiants. L’un d’eux m’a annoncé qu’il se préparait au baptême. Hosannah ! Chez les intégristes : Ah.

Il ne partageait pas mon admiration pour la douceur de Jésus, sa liberté à l’égard de la Loi faite pour l’homme et non l’homme pour la Loi, sa patience et son indulgence.

Il croyait à la Loi. Il croyait qu’il suffit de l’appliquer, en force si nécessaire, et il reprochait à l’Eglise sa mollesse. Il croyait que la Loi peut tout résoudre. Il était sincère, sympathique, idéaliste, croyant pratiquant. Que lui manquait-il ?

Vous vous souvenez de la rencontre de Jésus avec le jeune homme riche qui lui avait demandé : ‘Que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle ?’. Jésus l’avait renvo aux commandements de la Loi, y compris ‘tu aimeras ton prochain comme toi-même. Et l’homme avait dit alors à Jésus : « Tout cela, je l’ai observé. Que me manque-t-il encore ? »(Mt 19, 20).

Une fois que nous avons obser la Loi, que nous manque-t-il encore ?

Que nous manque-t-il encore ? Pour suivre le Christ, pour nous unir à Lui, doux et humble de cœur ? Autrement dit, quels sont les piliers de la douceur ?

La patience, l’humilité et la liberté.

La patience davantage que la tolérance. La tolérance consiste à supporter un mal qu’on ne peut pas empêcher, tandis que la patience accepte la personne telle qu’elle est, avec touteconfiance dans la puissance transformante de l’amour. La douceur a pour elle l’éternité.

L’humilité de Jésus se voit à la fin de ce passage de l’évangile quand il quitte la communauté qui l’avait accueilli. Il ne se pose pas la question de savoir si ça lui coûte, s’il préfèrerait rester : il accomplit sa mission. Il y a des questions qu’il vaut mieux ne pas se poser, de savoir si ça nous fait plaisir, quand ce qui importe est : quelle est ma mission ?

Enfin, la liberté fait la différence entre la mollesse et la douceur. Dans une de ses dernières conférences, le Père Varillon disait qu’être un homme libre, « c’est être capable d’affronter la mort ». Lorsque Jésus prend le chemin de Jérusalem où il va donner sa vie, il durcit son visage (Lc 9, 51).

Voyez dans la 2ème lecture de ce dimanche cette magnifique parole de saint Paul : « Je me suis fait tout à tous pour en sauver à tout prix quelques-uns » (1 Co 9, 22). ‘Se faire tout à tous’, ouvert aux uns comme aux autres pour leur Salut, fort avec les forts et doux avec les faibles. Libre.

Telle est la douceur de Jésus, fort dans sa mission, doux et humble de cœur. Une douceur quitranscende la dureté de la loi, jusqu’à la loi de la mort. La douceur de Jésus transcende la dureté de la loi. Elle ne la contredit pas. Jésus doux et humble de cœur, libre et fort.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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