25ème dimanche du temps ordinaire - 24 septembre 2023

Mt 20, 1-16

 

Si j’étais Archevêque de Paris, je porterais de temps en temps une écharpe du PSG. J’irais au Parc des Princes dont je nommerais le Curé de la Porte d’Auteuil l’aumônier. J’assumerais le fait que chaque église particulière est marquée et déformée par son histoire, tributaire de son environnement, et n’est pas une entité abstraite. Ici, c’est Paris !

Si j’étais Archevêque de Paris, je demanderais à l’aumônier des artistes, que je baserais à saint Germain des Prés, la plus belle des églises de Paris depuis qu’elle est rénovée, s’il a pris des places pour le concert de Taylor Swift en mai prochain … et comment aider les musiciens et chantres à contribuer à la qualité des célébrations d’obsèques, de mariages, de baptêmes : évangéliser par le beau.

Si j’étais Archevêque de Paris, je rencontrerais les patrons des sociétés les plus dynamiques pour les interroger sur la question de la juste rémunération au cœur de la parabole de ce dimanche. Je chargerais le curé de Notre-Dame du Travail de suivre ce lien complexe entre travail, rémunération, talent, justice, réussite et motivation.

C’est le problème essentiel, la motivation. On pourrait dire l’énergie qui sommeille en chacun comme dans cette parabole où ils attendent dehors … C’est la question des vocations, et de l’engagement des fidèles – d’où vient la motivation, l’énergie ?

Comment faire quand on ne peut ou ne veut pas jouer sur la rémunération ?

C’est le problème de notre société : comment donner envie de travailler quand études et santé sont financées par l’Etat ? Les ouvriers de la première heure de cette parabole ressemblent à certains de ces contribuables majoritaires dans l’Ouest parisien, minoritaires dans le pays, qui n’y trouvent plus fierté.

La motivation des temps passés était la même pour la religion que pour le travail : la peur de l’exclusion, l’enfer pour les mécréants la misère pour les fainéants – le mot ne s’applique pas au présent, il renvoie au temps où les parents montraient les mendiants aux enfants : ‘voilà ce qui t’arrivera si tu ne travailles pas’.

Pour nous croyants, l’énergie vient de l’Esprit Saint et notre motivation est l’adoration de Dieu sans risque d’erreur : « Mon Dieu, je crois fermement toutes les vérités que Vous nous avez révélées et que Vous nous enseignez par Votre Sainte Église, parce que vous ne pouvez ni Vous tromper ni nous tromper ».
Aucune erreur possible de la part du maître de cette parabole qui représente le Souverain des choses de ce monde, le Seigneur : aucune erreur de sa part et donc aucune injustice.

Dieu est le seul qui peut faire ce qu’il veut de ses biens.

Aucun être humain n’a le droit de le dire ni de le penser : nous n’avons pas, nous, le droit de faire ce que nous voulons de nos biens parce que nous pouvons nous tromper.

Dieu seul est infaillible et la reprise de ce terme par l’Eglise dans le dogme de l’infaillibilité pontificale a été une erreur (même s’il n’a été utilisée qu’une seule fois et à raison en 1950 pour l’Assomption de Marie). L’infaillibilité est comme l’immortalité : une exclusivité divine.

Une fois qu’on a rappelé cela, on peut relire cette parabole pour ce dont elle parle, non pas du travail mais de la récompense, non pas de la justice mais de l’égalité.

Le semeur est sorti pour semer et le maître est sorti pour appeler. Et aucun ouvrier n’a refusé parce que ce n’est pas d’un travail qu’il s’agit mais d’un honneur.
Le Pape Benoît XVI l’a décrit ainsi en 2008, rappelant ses propos inspirés trois ans plus tôt au soir de son élection : « Quand je me suis adressé à la foule Place Saint-Pierre, je me suis spontanément présenté comme un ouvrier de la vigne du Seigneur. Pouvoir travailler dans la vigne du Seigneur, se mettre à son service, collaborer à son œuvre, constitue en soi une récompense inestimable, qui compense toutes les peines.
Seul celui qui aime le Seigneur et son Royaume le comprend ; celui qui travaille en revanche uniquement pour son salaire, ne comprendra jamais la valeur de ce trésor inestimable ».

Seul, faut-il ajouter, celui qui a l’énergie de l’Esprit-Saint et se met à son écoute sait ce que veut dire : égalité. Egalité des personnes divines, dans l’unité et dans l’amour.

L’Esprit Saint est Seigneur : il est Dieu, égal au Père et au Fils. Il n’y a pas le Père et le Fils, encore moins le Père puis le Fils et enfin l’Esprit. L’Esprit Saint est Seigneur ! Il reçoit – il exige même adoration et même gloire.

De notre contemplation de la parfaite égalité des trois personnes divines au sein de la Trinité dépend notre capacité à chercher la même égalité entre nous, à respecter notre égale dignité.

Nous sommes Chrétiens quand nous reconnaissons à chaque personne son égale dignité.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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