Le Saint-Sacrement que nous fêtons en ce jour, du Corps et du Sang du Christ, sacrement de l’unité et de la charité, est un des noms de la Messe.
On disait jadis les Saints Mystères, Mystère venant du grec, Sacrement du latin.
On l’appelle aussi la Fraction du pain, parce que Jésus ‘rompit le pain’, définition originelle du ‘symbole’ : le partage d’un objet dont chacun gardait une partie pour s’identifier et se reconnaître. La Fraction du pain a été un des premiers noms de la Messe, des premiers disciples qui étaient « assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières » (Ac 2, 42). Ils célébraient la messe chez eux : « ils rompaient le pain dans les maisons » (Ac 2, 47), ce qu’on appelle une Eucharistie domestique, très en vogue après 68.
La Messe s’appelle aussi le Repas du Seigneur (1 Co 11, 20) puisque le Christ l’a instituée au cours du Dernier repas qu’il prit avec ses disciples, et plus fréquemment encore Eucharistie, action de grâce : Jésus prit du pain et rendit grâce, en grec Eucharistie (Lc 22, 19).
Le Saint-Sacrement. La Fraction du pain. Le Repas du Seigneur. L’Eucharistie. On l’appelle également Mémorial que Jésus nous a ordonné de faire en mémoire de Lui, ou, en Orient, la Synaxe, l’Assemblée qui est le principe de la Messe, surtout le Dimanche.
Mais le plus important des noms de la Messe est le Sacrifice.
Le Saint-Sacrifice comme on dit le Saint-Sacrement.
Le Saint-Sacrement renvoie aux autres sacrements : au Baptême qu’il suppose, ainsi qu’à la Confirmation qu’on recevait avant de faire sa 1ère Communion : les enfants étaient baptisés à la naissance pour les délivrer du péché, et leur vocation à la Sainteté était confirmée par la Confirmation à l’âge de raison, avant qu’il fasse vers dix douze ans sa 1ère Communion. Le Baptême, sacrement de la foi. La Confirmation, sacrement de la raison. La Communion, sacrement de l’unité dans la charité.
Nous en avons gardé trace dans le temps liturgique en célébrant le baptême des adultes à Pâques, puis la Confirmation à la Pentecôte – dont l’Octave s’est terminé dimanche dernier par la fête de la sainte Trinité, avant de célébrer aujourd’hui le Saint-Sacrement, dont le nom souligne le lien organique aux autres sacrements : la Réconciliation, la Confession ! L’Alliance, le Mariage ! Et bien sûr l’Ordination pour qu’il y ait un prêtre pour célébrer la messe … Nous prierons pour les prêtres vendredi prochain, en la fête du Cœur sacré de Jésus.
La succession de ces fêtes est une catéchèse en soi.
Si le Saint-Sacrement marque le lien à l’Eglise, le Saint-Sacrifice nous recentre sur le Christ.
Ce sacrifice a été fait une fois pour toutes par le Christ, la messe l’actualise, le rend présent, efficace, en nos cœurs et en nos vies : « sacrifice de louange » (He 13, 15), « sacrifice spirituel » (1 P 2, 5), « sacrifice pur et saint » (Ml 1, 11), qui reprend, récapitule, « achève et dépasse tous les sacrifices de l’Ancienne Alliance » (Catéchisme de l’Eglise Catholique, n. 1330). Sacrifice de toute l’Eglise, l’expression annonce le début de la prière eucharistique : « Prions ensemble au moment d’offrir le sacrifice de toute l’Eglise ».
De toute l’Eglise. Et de chacun de nous en particulier : notre participation à la messe dépend en effet des sacrifices que nous apportons.
Nous venons à la messe les mains vides. La formule signifie que l’amour de Dieu ne s’achète pas, mais elle signifie aussi que pour répondre à cet amour nous devons nous y associer, y participer, mettre de côté bien des choses, sacrifier un certain nombre d’autres activités, d’autres possibilités, parce que l’amour exige des sacrifices.
Quand je dirai à voix basse à la fin de l’offertoire : « le cœur humble et contrit, nous te supplions Seigneur, que notre sacrifice en ce jour trouve grâce devant toi », demandez-vous quel est votre sacrifice à vous ? Par quels sacrifices est-ce que vous êtes venus vous unir au Christ et nous unir les uns aux autres ?
Je comprends qu’on s’ennuie à la messe quand on n’a pas de sacrifice à offrir.
Pourquoi tant de Chrétiens ne vont-ils plus à la messe ? N’est-ce pas parce qu’ils ne sont plus formés à imiter le Christ Jésus, qui a renoncé jusqu’à sa condition divine par amour pour nous ? Qui s’est sacrifié pour nous.
Au cœur de la messe, il y a ce lien mystérieux de l’amour et du sacrifice.
La messe est le sacrement de l’unité quand elle est la synthèse de tous nos sacrifices.
Quand le sacrifice du Christ devient le sacrifice de toute l’Eglise.
Père Christian Lancrey-Javal, curé
Vous avez la possibilité de recevoir les homélies du Père Lancrey-Javal en remplissant ce formulaire