Dimanche dernier, nous avions dans l’évangile un enseignement sur le pur et l’impur, où Jésus s’adressait successivement aux spécialistes, les pharisiens et les scribes, puis à la foule, et enfin à ses disciples en privé. Vous aviez peut-être remarqué dans la numérotation des versets (Mc 7, 1-8.14-15.21-23) que la liturgie avait sauté une dizaine de versets pour faire court, dont un refrain de Jésus : « Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! » (Mc 7, 16 ; 4, 23).
Ses pas l’ont conduit ensuite hors d’Israël, en territoire païen, dans la région de Tyr où Jésus a guéri la fille d’une syro-phénicienne après une courte joute verbale (Mc 7, 24-30), juste avant la guérison qu’on vient d’entendre d’un sourd qui avait du mal à parler.
L’hébreu biblique ne fait pas de différence entre sourd et muet, une des prescriptions du chapitre 19 du Lévitique (ce grand texte sur l’amour du prochain) peut se traduire aussi bien par : ‘tu n’insulteras pas un sourd’ – parce que, même si l’autre ne l’entend pas, l’injure te dégrade toi qui la prononces (à graver sur le volant de sa voiture), que : ‘tu n’insulteras pas un muet’ – ce serait déloyal puisqu’il ne peut pas te répondre.
Le sourd a du mal à parler. Sur le plan symbolique cela s’applique à notre relation à Dieu : si je n’écoute pas sa Parole, comment pourrai-je le prier ?
Pendant des années, je me suis disputé avec un vieil oncle que j’aimais beaucoup et voyais souvent, devenu ‘sourdingue’ suivant ses termes et il en souffrait surtout aux repas quand il ne pouvait plus suivre les conversations. Il était athée intéressé et son dada était qu’il fallait remplir les églises avec des messes ‘comme à Harlem’. Je lui répondais que le problème de nos messes n’est pas qu’elles soient peu dansantes mais pas assez recueillies. C’est la raison pour laquelle je fais des messes brèves, trois quarts d’heure, parce que notre capacité d’attention est limitée.
Ma suggestion pour cette année est que vous preniez soin du quart d’heure avant et du quart d’heure après, par exemple en éteignant votre portable en partant de chez vous, idéalement de venir sans. Le pire ennemi de la prière, aujourd’hui, est le téléphone portable : ce qui nous rapproche est ce qui nous sépare – l’argent, la foi, la famille, la technologie. Je sais les objections habituelles, l’alcoolique jure ses grands dieux qu’il arrête quand il veut.
Deuxième proposition pour cette année, – votre mission sera d’amener un non-baptisé à Jésus. Pas uniquement à la messe, pour remplir les églises comme le voulait mon oncle mais comme le montre l’évangile : l’amener à Jésus pour que Jésus le prenne avec lui, à l’écart, le sorte de la foule pour le faire entrer dans l’intimité de son amour. Cela suppose que nous ayons nous-mêmes cette capacité à aller à l’écart, à Jésus.
Aux fiancés qui n’ont aucune pratique religieuse, je demande parfois s’ils ont, parmi leurs amis, de bons et fidèles pratiquants. Zéro ? Ouch ! Pareil pour les Catholiques à qui je demande s’ils ont parmi leurs amis des non-baptisés. Zéro ? Mais comment on va faire ? si chacun reste dans l’entre-soi
Troisième proposition pour cette année, qui dépasse la sidération des témoins de cette guérison, « extrêmement frappés » dit le texte, cette troisième proposition est la conséquence de la première (une liberté à l’égard des écrans) et la condition de la deuxième (la mise en relation d’un non-croyant avec Jésus), elle consiste à imiter le trait le plus sympathique des Saints : la bonne humeur. C’était la qualité de saint François d’Assise : sa gaieté ! et ce qu’il nous faut cultiver en cette rentrée, ce mois de septembre dit temps pour la Création : l’écologie chrétienne de la bonne humeur. Un Psaume dit : Qui sème dans les larmes moissonne dans la joie. Imaginez : Qui sème dans la joie … Effata ! Il ouvre son cœur au Seigneur !
Pourquoi saint François était-il dans la joie ? Il avait foi en la Providence divine. Voilà ce qui sera la ligne directrice de notre année : la foi en la Providence divine, le mystère de Dieu qui vient à notre secours.
« Commence mon enfant, la Providence viendra à ton secours ».
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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