Chaque dimanche de Pâques a son thème, sa coloration, qui déploie et approfondit ce que nous avons célébré le Jour de Pâques : la joie de la Résurrection. Je vous ai dit cela dit Jésus pour que ma joie soit en vous, la joie d’entrer par Lui, le Christ, dans la vie du Père.
Le 2ème dimanche est le dimanche de la Miséricorde, l’amour qui pardonne.
Le 3ème dimanche, de l’humanité retrouvée, je vous disais qu’il nous faut être humain avant d’être chrétien, revenir sur terre pour aller au Ciel.
Le 4ème dimanche est le dimanche du Bon Pasteur, sur des verts pâturages il nous fait reposer ; il nous protège de l’oubli et du doute.
Le 5ème dimanche, dimanche dernier, la parabole de la Vigne dit notre lien vital au Christ : sans moi dit Jésus vous ne pouvez rien faire. Ce lien, commentait saint Cyrille d’Alexandrie, est l’Esprit-Saint : « Ce qui nous unit au Christ Sauveur, c’est son Esprit Saint » (Office des Lectures, mardi de la 5ème semaine de Pâques).
Et nous franchissons un nouveau pas en ce 6ème dimanche dans la connaissance de l’amour, par l’égalité entre nous. A quelques jours de l’Ascension du Seigneur, la 3ème plus grande fête du Christ après Noël et Pâques, après la Nativité et la Résurrection, pour préparer cette entrée de notre humanité dans la Gloire, ce 6ème dimanche nous met au pied du mur avec le commandement de Dieu de vivre à égalité les uns avec les autres.
La 1ère lecture en donne l’expression parfaite quand Pierre, voyant ce centurion de l’armée romaine se prosterner à ses pieds, lui dit : « Lève-toi. Je ne suis qu’un homme, moi aussi » (Ac 10, 26). L’usage pendant longtemps des Catholiques a été de plier le genou devant l’Evêque, baiser la bague épiscopale en disant ‘Monseigneur’. J’ai vu plus d’un évêque un peu gêné sans jamais avoir entendu : ‘Je suis un homme comme toi’. Je ne suis pas sûr qu’ils le pensent. Les honneurs rendent fous. Je vois bien comme je tique quand on m’appelle Monsieur. Et alors ? Qu’est-ce qui importe : la fonction ou la personne ? L’utilité sociale ou la relation personnelle ?
Cette 1ère lecture est tirée d’un des cinq discours dits de mission de Pierre dans les Actes des Apôtres, ainsi appelés parce que centrés sur la Résurrection, le 1er le jour de la Pentecôte, nous avions au 4ème dimanche le 2ème après la guérison du boiteux de la Belle Porte, et voici qu’on a ici le dernier qui fonde nos relations entre nous, dans l’Eglise et avec le monde, par ces mots puissants : « Dieu est impartial : il ne fait pas de différences entre les personnes. Il accueille, quelle que soit la nation (l’ancienne traduction disait la race), celui qui le craint et dont les œuvres sont justes ».
Ou encore, en termes actuels : « Il accueille, quelle que soit la religion, celui qui le craint et dont les œuvres sont justes ». Celui qui pratique sa foi et la justice.
Dieu ne demande que deux choses : le prendre au sérieux (Dieu ne se laisse pas narguer, dit saint Paul Gal 6, 7), et aimer autant les pauvres que les puissants, ne mépriser ni les faibles ni l’autorité. Vivre à égalité entre pauvres et riches, le natif et l’étranger, l’homme et la femme.
Sept siècles avant le Christ, le prophète Michée annonçait cette voie : « Homme, on t’a fait connaître ce qui est bien, ce que le Seigneur réclame de toi : rien d’autre que respecter le droit, aimer la fidélité, et t’appliquer à marcher avec ton Dieu » (Mi 6, 8).
Et si c’était par méconnaissance de Dieu que nous avions tant de mal aujourd’hui à respecter le droit ? Si c’était d’un manque de foi que viendrait notre propension à transgresser la Loi ?
Voyez comment le Christ dans sa révélation de l’amour de Dieu reprend le vocabulaire de l’Ancien Testament du commandement et de l’obligation : je vous commande dit-il de vous aimer les uns les autres, comme je vous ai aimés. Et il utilise ce vocabulaire pour une raison simple : la Loi est ce qui nous met à égalité. Nous ne sommes pas égalité dans la vie, de par nos origines et nos talents, mais nous le sommes devant Dieu et devant la Loi.
Homme, on t’a fait connaître ce qui est bien, ce que le Seigneur réclame de toi : rien d’autre que respecter le droit, aimer la fidélité, et t’appliquer à marcher avec ton Dieu – même si ce Dieu n’est pas le vrai Dieu ? Peut-on vraiment dire que Dieu accueille celui qui le craint et dont les œuvres sont justes quelle que soit sa religion ?
Sainte Mère Teresa répondait oui, pour qui notre mission est d’aider les pauvres à mener une vie digne et apaisée. A la question sans cesse répétée des motifs qui la poussait à offrir un service si effacé, elle affirmait vouloir aider la personne hindoue à vivre en meilleur hindou, le musulman en meilleur musulman, le chrétien à vivre en meilleur chrétien, dans le respect de la conscience de chacun et de la Loi. C’est le critère qui nous sépare des fanatiques : le respect de la Loi. On sait qu’on peut et même qu’on doit en conscience désobéir à la Loi quand elle conduit au péché. Pierre le dit dans un autre discours des Actes (Ac 5, 29-32) : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes ».
Est-ce que le fanatique peut agir en conscience ? Par définition non puisqu’il est exalté, pathologiquement. Il n’y a pas que les honneurs qui rendent fous : les déshonneurs encore plus, le manque de considération, le sentiment de rejet, d’exclusion et de mépris.
Ah, si chaque personne pouvait expérimenter au moins une fois dans sa vie l’amour dont elle est aimée par Celui qui l’a créée, Dieu qui est venu donner sa vie pour la sauver et la sauver de la haine. Celui qui craint Dieu et dont les œuvres sont justes – est déjà sauvé.
Dieu aime les croyants qui respectent la Loi.
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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