Exode 21, 24. Lévitique 19, 18. ‘Je ne connais pas par cœur tous les numéros de téléphone’, grommelait notre professeur d’Ecriture sainte, le Père Thomas Kowalski pour nous faire comprendre que la connaissance de ces références bibliques sont secondaires. Exode chapitre 21, verset 24. Lévitique chapitre 19, verset 18. L’Exode et le Lévitique sont deux des cinq livres de la Loi, le Pentateuque, avec la Genèse, les Nombres et le Deutéronome. Quand je suis entré au Séminaire, je n’en avais lu aucun entièrement, comme la plupart d’entre vous : très peu de Catholiques lisent la Bible de façon continue car nous en recevons les meilleurs morceaux à la messe, depuis des générations.
Maintenant que je connais et pratique les deux, la lecture suivie et les extraits aux messes, je peux vous garantir que le dosage est bon. L’Eglise nous donne à la messe la bonne quantité de nourriture dont nous avons besoin. Nous l’entendrons dimanche prochain : L’homme ne vit pas que de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
A trois jours du Mercredi des Cendres, la résolution de Carême que certains pourraient prendre serait de lire chaque jour les textes de la Messe. En prenant le temps de laisser descendre la parole dans votre cœur. Dix minutes chaque jour, idéalement la veille au soir ou en vous levant le matin, vous lisez, méditez, et gardez une phrase qui vous parle, qui vous accompagne tout au long de la journée.
Exode 21, 24. Lévitique 19, 18. Ce sont les deux références que Jésus cite avec cette formule : ‘Il a été dit’ ou ‘Il a été dit aux Anciens’ qui correspond à ce que nous appelons une Tradition religieuse, la nourriture spirituelle des générations qui nous ont précédés. Nous sommes les descendants de générations de baptisés, de Chrétiens qui ont fait la grandeur de notre pays, la France, mais avant tout de l’Eglise, un peuple de saints.
L’antique ennemi, le serpent peut toujours distiller, avec une rare efficacité, son venin, vous convaincre que le monde a changé, et que vous êtes plus intelligents que vos parents, il n’en est rien. Ni meilleurs, ni pires ; aussi prétentieux, aussi vulnérables.
Le seul qui puisse le dire, et que vous puissiez croire, c’est le Christ. Eh bien ! moi, je vous dis. Et il peut le dire il y a deux mille ans comme il peut le dire aujourd’hui.
Exode 21, 24. Lévitique 19, 18.
Commençons par Exode 21, 24. C’est un texte de justice sociale, qui fixe une règle morale de proportionnalité dans nos réactions, en cas de dol, dommage ou accident : « s’il y a accident, tu donneras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, pied pour pied, brûlure pour brûlure, meurtrissure pour meurtrissure, plaie pour plaie » (Ex 21, 23-25). La proportionnalité est la seule façon d’éviter l’escalade, de maintenir la paix, normaliser nos relations, c’est un bon principe de mesure, d’égalité et juste réciprocité. Jésus le rappelle au garde qui le gifle devant le Grand Prêtre : « Si j’ai mal parlé, explique ce qui est mal ; mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frapper ? » (cf. Jn 18, 23). Le soldat le frappe, qui refait ce qu’on a fait avec lui : on ne lui a pas appris à faire autrement, et il ne dispose ni de la patience, ni du langage, ni de la maîtrise de soi pour se comporter humainement.
Patience, langage, maîtrise de soi : nous sommes allés à l’école pour continuer à apprendre ce que nos parents avaient commencé à nous enseigner, à écouter, à parler, à nous réfréner. Nous prions pour continuer à apprendre les trois : écouter, parler, partager.
En Dieu, la patience est infinie. Elle est la preuve suprême de son amour, on pourrait même dire que la Patience est l’Etre du Père, tandis que sa Parole est une personne à part entière, la 2èmede la Trinité, son Fils : Gloire au Christ, Parole éternelle du Dieu vivant ! dit une acclamation de Carême. Et le Don est le nom du Saint-Esprit, la force de ne pas prendre ou garder pour soi, la force du partage et de la générosité.
Ecouter, parler, partager. Cela nous amène au 2èmerenvoi à l’Ancien Testament, après Exode 21, 24 – Lévitique 19, 18 : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Nous avons entendu le texte en 1èrelecture. Il complète bien le propos de l’Exode : « Tu ne te vengeras pas. Tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Je suis le Seigneur » (Lv 19, 17-18).
Et voilà que Jésus ajoute : « Et tu haïras ton ennemi », qui ne se trouve pas dans le texte ! Pourquoi ?
Parce que c’est ce qu’il constate. Non pas que nous sommes prompts à aimer ceux qui nous aiment et pas ceux qui ne nous aiment pas. Il n’y a pas besoin d’être Dieu pour le constater. Non, il constate notre propension à modifier sa Parole pour qu’elle soit compatible avec notre vie, alors qu’il nous demande l’inverse : que nous corrigions notre vie pour qu’elle corresponde à sa Parole !
Combien de fois m’arrive-t-il de dire, y compris à moi-même : arrête de vouloir faire entrer Dieu dans ta vie, – tu ne peux pas, Il est Dieu ! C’est à toi ! C’est à nous d’entrer en Lui, de nous tourner vers Lui, de chercher à lui obéir, à le servir, à lui ressembler.
Faire entrer Dieu dans notre vie est aussi absurde que l’univers dans notre agenda.
Faire entrer Dieu dans notre vie ?
Pourtant, ne dit-il pas Lui-même, dans le livre de l’Apocalypse : Voici que je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un m’ouvre, j’entrerai, je ferai ma demeure en lui ? Pourtant, ne croyons-nous pas qu’il va entrer en nous par l’hostie que nous allons consommer ?
N’est-ce pas la volonté de Dieu de vouloir ‘demeurer en nous’ ? Si, mais d’abord nous en Lui.
Nous butons sur le commandement d’amour de nos ennemis si nous partons de nous-mêmes, et de notre capacité à aimer, qui est déjà si faible, si inconstante pour ceux que nous aimons et qui nous aiment.
Aujourd’hui, le Seigneur nous demande de renoncer à nos forces, nos capacités, nos talents, en tout cas en matière d’amour, pour le laisser agir, Lui, en nous.
Seigneur, nous voulons nous unir à toi, nous voulons entrer dans ta vie, de lumière et de paix, nous voulons vivre de ton Amour. Envoie ton Esprit. Donne-nous la grâce de nous laisser faire et conduire, en imitant ton exemple, en écoutant et en méditant tes paroles. Amen.
Père Christian Lancrey-Javal, curé
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